. Le monachisme en Méditerranée (A) : Le monachisme insulaire dans l’archipel du Kvarner (Croatie) entre le Ve et le XIe s


Axe 1. Parcours et échanges en Méditerranée

 

 
Responsables : Sébastien Bully (CNRS, UMR ARTeHIS Dijon-Auxerre), Morana Čaušević-Bully (Université de Franche-Comté)

Le projet scientifique porte les fondations monastiques de l’Antiquité tardive jusqu’au XIe s. dans l’archipel du Kvarner en Croatie. Situé entre la péninsule istrienne et la baie de Rijeka, cet archipel regroupe les îles de Krk, Cres, Lošinj, Rab, Pag et une multitude d’îlots. Ces îles ont une identité géographique et historique forte qui sera déterminante pour le développement des axes de recherches engagés. L’historiographie croate n’a jamais pris en compte le rôle et la place des fondations monastiques sur le territoire du limes maritime septentrional dans la construction des territorialités entre l’Orient byzantin et l’Occident vénitien. L’intérêt s’est essentiellement porté sur l’architecture et le décor sculpté des édifices religieux. La raison de ce désintérêt pour l’archéologie monastique sur la côte adriatique croate est vraisemblablement liée à la nature des vestiges, à leur état de conservation extrêmement ingrat et à la difficulté d’appréhender des structures et des dispositifs qui ne renvoient pas obligatoirement à des modèles ou des schémas connus par ailleurs. Pourtant, la Dalmatie – au sens historique et maritime – n’est pas restée en marge du développement d’un monachisme précoce dans le bassin méditerranéen. En témoigne l’extrait bien connu de l’Exhortation à Julianus par saint Jérôme, où il évoque les monastères que construisent Julianus et les nombreux moines des îles Dalmates. Au milieu du VIe s., la « consolidation » de la reconquête justinienne a marqué le paysage des îles et du littoral par la construction de fortins surveillant les principales voies maritimes. Pour l’Italie du Nord, une thèse récente suggère que Byzance aurait favorisé l’implantation d’ermitages en lien avec le limes avec les Goths, puis avec les Lombards. Qu’en est-il pour le limes maritime ? Concernant la Dalmatie historique, en l’absence de sources écrites sur ces questions, c’est donc souvent sur la base de conjectures entre vocable et toponymie, contexte topographique et géographique, nature des vestiges et tradition que l’on est tenté de reconnaître des monastères. La totalité des monastères recensés occupe des îles ou des îlots de la Dalmatie centrale : la région du Kvarner est absente. Pourtant, les îles de la Dalmatie du Nord font partie intégrante des territoires reconquis dans la première moitié du VIe s., et surtout, elles resteront encore tardivement sous l’autorité byzantine quand le littoral passera sous domination slave ou franque au haut Moyen Âge. Dans le cadre de ce projet scientifique, il conviendra d’établir un premier état des lieux des monastères présumés à travers la prise en compte des vestiges existants et de leurs contextes topographiques et géographiques.
Plus largement, les fondations monastiques semblent refléter les changements politiques survenus dans la région entre les VIe et XIe s. Ainsi, alors que l’on observe une implantation des bénédictins dès le milieu du IXe s. sur la côte et dans l’arrière-pays Dalmate – correspondant aux territoires des Croates, il faudra attendre le début du XIe s. pour que ceux-ci se diffusent dans les îles du Kvarner. C’est le cas du monastère Saint-Pierre d’Osor, qui aurait été fondé vers 1018, époque où Byzance se retire au profit de la domination vénitienne. Cette fondation monastique, épiscopale, pourrait être perçue comme un premier marquage territorial du nouveau « pouvoir occidental » sur la côte adriatique orientale. Se pose ici la question des conditions et des modalités de la fondation de ces nouveaux monastères dans leur rapport avec des occupations religieuses ou laïques antérieures et le choix des lieux d’implantations. Ainsi, il apparaît que certains monastères bénédictins investissent des églises paléochrétiennes qu’ils transforment en fonction de leur nouvel usage. L’emplacement du monastère d’Osor le long d’une voie maritime importante entre Istrie et Dalmatie, n’est certainement pas fortuit. Cette relation étroite entre voie maritime et monastères bénédictins suggère que les nouveaux établissements monastiques servent aux contrôles des voies et à l’accueil des voyageurs. Il conviendra de développer cette approche et de l’étendre à l’ensemble des monastères insulaires, toutes périodes confondues. Mais l’insularité, terme générique ici retenu, recouvre cependant des réalités différentes, voir contradictoires : quels points communs existent-ils entre un monastère bénédictin occupant une grande île habitée, disposant d’un évêché – espace quasi-continental – et un ermitage basilien – supposé – sur un îlot isolé ? Ces deux cas de figures répondent-ils à des exigences spirituelles identiques, notamment celle du retrait du monde dans le « désert » d’une île sainte ou faut-il envisager d’autres aspects liés à ces fondations, comme celle de la construction d’un espace politique maritime ?
Les principaux objectifs peuvent donc se résumer ainsi : il s’agit de cartographier et de dresser un état des lieux inédit des sites afin, d’une part, d’en évaluer le potentiel archéologique et d’autre part, de proposer une première lecture d’un paysage monastique maritime sur une longue durée. Seule une approche archéologique, à travers l’appréhension des vestiges et leur contextualisation (voies de communications, fortifications, centres d’exploitations du milieu etc.) permettront d’appréhender la question des rapports équivoques entre : monastère et recherche d’un « désert » maritime, monastère et volonté d’un « marquage politique ». Les deux principaux axes du programme concernent donc : 1. les conditions et modalités de l’installation et de la diffusion du monachisme insulaire dans le Kvarner entre le Ve et le XIe s. : occupation du sol et voies maritimes, construction de l’espace ; 2. la topographie monastique et l’architecture cultuelle : héritages et influences, cénobitisme et érémitisme.

Partenaires

  • MAEE
  • CNRS (UMR ARTeHIS 5594 Dijon-Auxerre)
  • Université de Zagreb - IRCLAMA (Croatie).

Calendrier des opérations

  • Les missions archéologiques soutenues par le MAEE se déroulent chaque année entre mai et juin. La mission porte, d’une part, sur la fouille programmée du monastère Saint-Pierre d’Osor (île de Cres) engagée depuis 2006 en collaboration avec le centre IRCLAMA et d’autre part, sur le programme de prospection-inventaire (avec sondages archéologiques) engagé sur les sites insulaires depuis 2010. La programmation quadriennale soutenue par le MAEE porte jusqu’en 2013 ; une demande de renouvellement sera formulée.
  • Un colloque international sur le monachisme insulaire (à Osor, sur l’île de Cres, en mai 2012).
  • Une table ronde sur Histoire et archéologie d'un espace insulaire : la côte adriatique entre Antiquité et Moyen Âge (à Besançon, en octobre 2013).

Participation EFR

  • Contribution financière aux fouilles
  • Logistique

Résultats attendus

  • Publication d'une monographie

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Contacts :

 

Prochaines manifestations et actualités

PROGRAMMES

Programmes structurants (2022-2026)

Axe 1 – Espaces maritimes, littoraux, milieux insulaires

Axe 2 – Création, patrimoine, mémoire

Axe 3 – Population, ressources, techniques

Axe 4 – Territoires, communautés, citoyenneté

Axe 5 – Croyances, pratiques et institutions religieuses

Axe 6 – L’Italie dans le monde

 

Projets financés par l'Agence nationale de la Recherche (ANR)

Axe 2 – Création, patrimoine, mémoire

Axe 3 – Population, ressources, techniques

Axe 4 – Territoires, communautés, citoyenneté

Axe 5 – Croyances, pratiques et institutions religieuses

Axe 6 – L’Italie dans le monde

 

Projet franco-allemand financé par l'Agence nationale de la Recherche (ANR) et la Deutsche Forschungsgemeinschaft (DFG)

Axe 6 – L’Italie dans le monde

 

Projets européens (Horizon 2020)

Axe 5 – Croyances, pratiques et institutions religieuses

 

Projets Impulsion

Axe 2 – Création, patrimoine, mémoire

Axe 3 – Population, ressources, techniques

Axe 4 – Territoires, communautés, citoyenneté

Axe 5 – Croyances, pratiques et institutions religieuses

 

 

 
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